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Je suis au RDC et je paye des charges ascenseur: est-ce normal ?

Une question que se posent de nombreux copropriétaires, essentiellement lorsque le règlement de copropriété est relativement ancien. En effet, il n'est pas rare de trouver des règlements de copropriétés antérieurs à 1965 prévoyant des tantièmes en charges ascenseur pour des lots situés en rez-de-chaussée. Cela signifie-t-il dès lors qu'un copropriétaire d'un lot en rez-de-chaussée est tenu de payer des charges ascenseur ? Pas nécessairement...


Sur quelle base le syndic établit-il les appels de fonds en charges ascenseur ?

Comme pour toutes les grilles de répartition existantes (charges communes générales, charges bâtiment, charges escalier, charges chauffage, charges parking etc), les charges ascenseur sont appelées sur la base d'une grille de répartition définie au règlement de copropriété à travers ce que l'on appelle l'état descriptif de division. Le syndic ne peut en effet de lui-même, sauf cas particuliers (par exemple pour créer une clé de répartition unitaire en fonction du nombre de compteurs ou de volets de chaque copropriétaire), pas créer et appliquer une grille de répartition de son propre chef.


Cela signifie-t-il qu'une grille de charge ascenseur qui prévoit des tantièmes pour le rez-de-chaussée entraîne le paiement de charges ascenseur ?

Pas forcément ! En effet, le principal fondement juridique qui s’applique ici est celui de l’article 10 de la loi du 10 juillet 1965 qui dispose que “les copropriétaires sont tenus de participer aux charges entraînées par les services collectifs et les éléments d'équipement commun en fonction de l'utilité que ces services et éléments présentent à l'égard de chaque lot”. Un critère généralement décrit comme constituant l’utilité dite objective, indépendante de la volonté ou des habitudes du copropriétaire d’utiliser ou non ce service.

Or, le copropriétaire d'un lot en rez-de-chaussée ne peut avoir objectivement intérêt ou utilité d'un ascenseur qui ne dessert que les étages. Il en va autrement si ce même copropriétaire est propriétaire de lots en sous-sol (cave, parking etc) et que l'ascenseur en question dessert bien le sous-sol. En pareil cas, le lot principal (appartement) n'aura probablement pas de tantièmes en charges ascenseur, à l'inverse des lots secondaires en sous-sols, qui eux seront amenés à contribuer en charges ascenseur.


Quid alors d'un règlement de copropriété prévoyant malgré tout des tantièmes en charges ascenseur ?

Un tel règlement de copropriété est tout simplement contraire aux dispositions d'ordre public de l'article 10 précité, comme le confirme régulièrement la jurisprudence. Notamment par un premier arrêt de principe publié au bulletin (Arrêt Civ 3e, 5 juin 1970), confirmé à de multiples reprises depuis, notamment le 9 mai 2019 (Arrêt 18-17.334). S’appuyant sur l’article 43 de la loi du 10 juillet 1965, l’arrêt de 1970 est venu préciser que “Toute clause [du règlement de copropriété] contraire aux dispositions des articles 6 à 17, 19 à 37 et 42 est réputée non écrite”, c’est à dire purement et simplement non applicable. Il est ainsi posé ici le principe absolu de la primauté de la loi et notamment de son article 10 (critère de l’utilité objective) sur toute disposition contraire d’un règlement de copropriété, les dispositions relatives à l’utilité objective devant alors s’analyser comme étant d’ordre public et d’application immédiate. Une position d’autant plus claire dans le cas présent, que la Jurisprudence est venue préciser que “toute clause d’un règlement de copropriété faisant peser sur les copropriétaires du rez-de-chaussée une partie des dépenses relatives à un ascenseur inutile pour leur lot, a été atteinte d’une nullité radicale le jour de l’entrée en vigueur de ladite loi”.


Nota: Il est d’usage d’utiliser les coefficients d’utilité de l’ascenseur par étage suivants:

  • Rez-de-chaussée : 0 

  • Premier étage : 1 

  • Deuxième étage : 1,5 

  • Troisième étage : 2 

  • Quatrième étage : 2,5


Que faire alors dans un tel cas ?

Nous déconseillons fortement de bloquer le paiement des charges sans autre démarche sur les tantièmes appelés en charges ascenseur. Nous recommandons en revanche une mise en conformité du règlement de copropriété, et éventuellement une demande de régularisation des charges appelées indûment sur les 5 dernières années (prescription quinquennale applicable en matière de charges de copropriété).


La loi ELAN imposait une mise en conformité relative aux parties communes spéciales (telles qu’une grille de charges ascenseur) dans un délai de trois ans à compter de son entrée en vigueur, soit jusqu’au 21 novembre 2021. Désormais, pour les immeubles mis en copropriété avant le 1er juillet 2022, le syndicat des copropriétaires n’est plus soumis à une condition de délai pour mettre en conformité son règlement de copropriété. En outre, la sanction d’inexistence des parties communes spéciales et droits de jouissance privative a disparu. Néanmoins, le syndicat des copropriétaires est contraint de porter à chaque assemblée générale ou spéciale, la question de la mise en conformité des règlements de copropriété à la loi ELAN.


Dès lors, nous recommandons d’adresser à brève échéance un courrier RAR au syndic afin de solliciter:

  • La réalisation aux frais des copropriétaires en charges communes générales, d’un modificatif à l’état descriptif de division visant à mettre en conformité le règlement de copropriété et notamment la grille de répartition des charges ascenseur, en supprimant notamment les tantièmes affectés au lot 48 à ce titre

  • L’inscription à l’ordre du jour de la prochaine Assemblée générale (ordinaire ou spéciale) de l’approbation du modificatif ainsi que sa publication, en donnant notamment mandat au syndic pour signer tous les actes nécessaires à cet effet

  • La régularisation sur 5 ans des charges appelées au titre des charges ascenseur pour le lot 48, qui devront être réparties sur l’ensemble des copropriétaires affectés en charges ascenseur C du nouvel état descriptif de division à créer et à publier


A défaut d’engagement des démarches en ce sens par le syndic, ou à défaut d’approbation en Assemblée générale, le copropriétaire lésé de saisir les juridictions d’une modification judiciaire des répartitions de charges de copropriété.



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